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Infolettres

Cataménia… Cata quoi?!

15 février 2023

Tu t’es peut-être déjà demandé d’où vient le mot cataménia que j’utilise abondamment. Tu ne l’as probablement jamais rencontré. Même en 40 ans de recherche sur les règles, je ne l’ai rencontré qu’une fois… par hasard… et jamais depuis. Je cherchais la définition du mot catimini dans le dictionnaire. J’avais entendu l’expression en catimini, qui veut dire en cachette. Elle me faisait penser à un joli petit minou… elle m’attirait.

L’origine du mot cataménia est le grec katamenia, qui réfère aux menstres.

Menia ou mene signifient le mois et, par analogie, les règles, comme dans ménopause (fin des règles), ménarche (premières règles) et plusieurs autres mots utilisés en médecine, comme dysménorrhée, oligoménorrhée, ménorrhagie, aménorrhée, etc.

Le sens originel du préfixe cata est plus nébuleux. On le retrouve dans le mot catabolisme, qui désigne la phase du métabolisme où les composés organiques se dégradent, libérant de l’énergie et des déchets. Et aussi dans catharsis (katarsis), qui signifie entre autres un déblocage.

En gros, cata désigne une coupure, un moment charnière dans un cycle. Après la cata, on n’est plus dans la même réalité qu’avant. Souvent la structure n’est plus la même. Les choses ont changé.

Avant de découvrir le mot cataménia, j’étais insatisfaite des expressions employées dans ma recherche. Je cherchais un terme qui désignerait la courte phase entourant le début de l’écoulement, soit juste avant et juste après.

J’avais appris que les femmes avaient plus d’activité dans l’hémisphère droit du cerveau quelques heures avant et quelques heures après le déclenchement des règles. Le mot prémenstruel ne fonctionnait pas, ne couvrant que la phase avant. Quant au mot périmenstruel, il me semblait trop flou, péri voulant dire « autour de ». Autour de quel moment exactement, et allant jusqu’où?

En tout cas, cataménia est super parce qu’il représente bien le phénomène de coupure qu’on rencontre à la fin du cycle et au début du nouveau. Dans cette infolettre, je veux faire reluire à tes yeux à quel point la cataménia est un moment révolutionnaire.

Et ce, à tous les niveaux. Commençons par le plan physique.

Lors de la cataménia, toute la couche de l’endomètre préparée par la différenciation de cellules souches se détache et est éliminée. Cela se produit alors même que la surface de l’endomètre est en train de se régénérer. C’est une mort-renaissance de l’endomètre, un serpent qui perd sa peau. Il est fascinant de voir ce phénomène sur des photos prises au microscope électronique.

Les os maintenant. En dehors de la période cataméniale, le tissu osseux est protégé par des taux d’estrogène relativement élevés, qui l’empêchent de se résorber. De plus, à la suite de l’ovulation, les sécrétions du corps jaune – notamment la progestérone – amènent des cellules souches des os à se différencier en ostéoblastes, soit des cellules qui vont reconstruire le tissu. Or, avec le déclenchement des règles, à cause de la chute abrupte des taux d’estrogène et de progestérone, une importante quantité de tissu osseux se résorbe ou se perd, libérant du calcium et des phosphates. Les nouveaux ostéoblastes sont alors prêts à régénérer le tissu.

On a ici un phénomène-type de destruction-reconstruction. Retenons simplement que dans un cycle normal avec ovulation, la cataménia est la période de plus grand remodelage des os. Elle constitue donc un point de rupture, de mort-renaissance à ce niveau.

Dernier exemple tiré du plan physique : les modèles sécrétoires de l’hypothalamus. Cette glande sécrète de petites quantités de neurotransmetteurs qui stimulent l’activité d’autres glandes du corps, dont les ovaires. Elle le fait par pulsations. Or les pulsations de neurohormones qui vont stimuler les ovaires sont plus ou moins rapprochées selon les phases du cycle. À l’ovulation, cette fréquence pulsatoire est à son maximum, à raison de 24 pulsations par jour, puis elle va diminuant graduellement jusqu’à seulement 2 par jour juste avant les règles. Tout à coup, à la cataménia, la fréquence saute abruptement à un autre niveau, celle de 16 par jour. Il y a rupture. C’est un autre exemple de moment charnière.

Allons voir du côté émotionnel.

Généralement parlant, les émotions sont amplifiées lors de la cataménia. Ce n’est pas surprenant, vu l’augmentation d’activité dans l’hémisphère droit du cerveau comparée à celle du cerveau gauche – généralement prédominante. Le droit est directement impliqué dans le traitement des émotions.

Beaucoup de femmes rapportent qu’elles ont des flashbacks, des retours d’événements traumatisants de leur vie, peu avant leurs règles. Par exemple, des souvenirs d’agressions sexuelles refont surface, se présentant de plus en plus clairement au fil des cycles.

J’ai souvent vécu de ces moments-là où, juste avant mes règles, je me sentais angoissée, mal dans ma peau, recourant à mes mécanismes de défense habituels pour fuir, faire cesser ce mal-être. Il m’est souvent arrivé que la tension se résorbe juste au moment de la cataménia, par un plongeon dans les zones particulièrement tendues de mon corps.

À part le formidable pop-up de prise de conscience du lien entre présent et passé, il se libérait en moi une énergie surprenante. Dès lors, la constellation touchée était résolue, et je changeais d’attitude ou de comportement. Je peux témoigner de renaissances multiples s’égrenant au fil des ans, comme des stepping stones dans ma libération émotionnelle.

De telles prises de conscience peuvent donner lieu à un renouveau sur le plan émotionnel. Quand cela se produit, la femme ressort de sa cataménia avec une énergie renouvelée par le relâchement de l’énergie bloquée. Comme dans le catabolisme dont il est question ci-dessus, où il y a libération d’énergie et élimination de déchets.

Comme bien d’autres femmes, j’ai souvent fait le ménage dans mes relations lors de la cataménia. Des insatisfactions de tout ordre s’imposaient à mon esprit, sans que je ne puisse rien y faire. Cela m’amenait à remettre en question certaines relations, tant dans le domaine intime que professionnel. Cela concernait parfois même des activités ou des environnements, dont je ne voulais plus dans ma vie. La première fois que j’ai menstrué, à 12 ans, j’étais en train de changer les meubles de place dans ma chambre.

C’est comme si notre âme s’occupait de nous dévoiler ce qui ne va pas – ou ne va plus – dans notre vie, question de rétablir l’ordre.

Voyons le plan cognitif maintenant.

Grâce, en partie, à la prédominance d’activité au cerveau droit, la pensée devient moins rationnelle et plus intuitive lors de la cataménia. Au lieu de se concentrer dans des petites cases comme dans le reste du cycle, l’activité cognitive procède par associations, par analogies, établissant des liens inusités. La cataménia favorise ainsi l’émergence d’idées nouvelles pour des projets créatifs.

Des idées qui nous apparaissaient contradictoires deviennent simplement des paradoxes, et on est plus à l’aise pour héberger dans notre pensée des idées ou des théories contradictoires. Cette cohabitation peut nous aider à refaçonner notre vision du monde.

On a donc ici, sur le plan cognitif, un autre exemple de rupture. On voit la vie différemment, on comprend plus de choses, on comprend mieux.

Sur le plan spirituel ou énergétique, ah! bien, là on a la cerise sur le sundae.

La cataménia tend à générer des états de conscience élargie. Bien sûr, cela dépend de l’état psychologique. Si l’esprit est captif d’une vision réductrice de soi et du corps à cause d’une perception négative des règles, il se peut que ces ouvertures soient difficiles. Mais la tendance est bel et bien là.

Pour de nombreuses femmes, lors de la cataménia, la perception du temps et de l’espace se modifie et le monde apparaît comme « non réel ». Plusieurs en sont surprises lorsque cela se produit. Ces phénomènes ne durent pas longtemps, mais ont un effet structurant – ou restructurant – sur la vision du monde.

Plusieurs phénomènes physiques qui se présentent durant la cataménia se produisent aussi lors des transes chamaniques. Je pense en particulier au transfert de prédominance d’activité du cerveau gauche au cerveau droit, au transfert de prédominance d’activité du système sympathique au parasympathique, et à la sécrétion de certains neurotransmetteurs tels que les endorphines, les endocannabinoïdes. On ne doit pas s’étonner de cela, car les hormones estrogène et progestérone ont des effets puissants sur tout le système nerveux, dont le système nerveux central.

Constatant une telle ressemblance, sur le plan neurologique, entre états de transe chamanique et cataménia, on ne peut faire autrement que de s’émerveiller devant la puissance du basculement que représente le changement de cycle.

Tu vois, il existe de nombreux avantages au cycle naturel des femmes. Les femmes qui prennent des contraceptifs hormonaux passent à côté de tout ça. Les taux d’hormones sexuelles qui circulent dans leurs veines et leurs artères ne sont pas les leurs. Ils ne reflètent ni la réalité qu’elles vivent, ni ce qu’elles sont en tant qu’âme – créatrice de leur corps.

La cataménia représente vraiment une rupture, une cassure, un passage ou une fissure dans la réalité ordinaire. C’est un entre-deux, un moment charnière ou de mort-renaissance. (Castaneda n’écrivait-il pas que les femmes sont dans la crack entre les mondes lors de leurs menstruations.) Elle manifeste un archétype présent dans tous les cycles, soit le point de bascule d’un cycle à l’autre, un moment de mort-régénération ou de mort-renaissance.

Cet archétype – ou fonction de création – cataménial se manifeste sur tous les plans de l’être, ce qui indique qu’il s’agit bien d’un archétype. On regarde ce qui se passe sur le plan physique, et cela nous amène à voir que la même fonction est à l’œuvre sur les autres plans.

Malheureusement, en nous faisant voir les phénomènes de la vie dans une continuité, notre culture occulte cet archétype de mort-renaissance. À toi de le reconnaître et de le faire revivre.

Sclérosée comme elle est, la société aurait avantage à ritualiser ces événements de régénération, ces passages d’un état à un autre, comme les sociétés tribales savaient si bien le faire. Seules toi et des personnes qui, comme nous, sommes conscientes de son importance, pouvons redonner à cet archétype sa place dans notre vie individuelle et collective.

Bien sûr, si tu es ménopausée ou si tu es un homme, tu n’as pas les fluctuations hormonales qui déclenchent la cataménia. Il existe toutefois des façons de provoquer les transformations émotionnelles, cognitives et spirituelles évoquées ci-dessus. Les cycles de la Lune ont un effet certain sur les êtres. Tu peux considérer la nouvelle lune comme un moment clé pour laisser aller le vieux et t’aligner sur le nouveau.

La chute d’hormones n’est pas là, mais la Lune, elle, est toujours là. Le point de bascule de son cycle peut être un moment clé pour plonger dans tes émotions, laisser émerger de nouvelles idées ou de nouvelles perceptions, faire un voyage chamanique, etc.

Je suis persuadée que le phénomène de la menstruation – en particulier la cataménia – a beaucoup à apprendre à l’humanité.